Haman Mana dans la presse







Mon beau Bamiléké
Les Bamiléké, tout le monde en sait quelque chose au Cameroun et à travers le monde. De manière éparse, empirique, inconsistante, avec la bonne dose de ces clichés rebattus et éculés.
Les Bamiléké demeurent un peuple mal connu qui, depuis des décennies pourtant, a été passé au crible de toutes les sciences humaines. Une communauté singulière, objet d’une curiosité et d’un intérêt au moins justifiés par l’attachement viscéral à sa culture et à son patrimoine ancestral. C’est en effet l’un des rares peuples dont la colonisation n’a pas réussi à éroder le pouvoir des traditions et de ceux qui les incarnent, les rois. Des souverains vénérés et craints qui règnent, chacun, sur son royaume. Souvent à peine plus grand qu’un quartier.
Voilà qui en rajoute au mystère qui continue d’entourer des populations sur lesquelles on peut en effet continuer de s’interroger. Pourquoi sont-elles si attachées à leur « village royaume » ? Pourquoi chaque Bamiléké se reconnaît-il dans son roi ? Comment ces chefferies, si semblables, restent indépendantes ou distinctes les unes des autres ? Comment se sont-elles construites au point, aujourd’hui, d’aligner plusieurs dynasties ?
Ce n’est pas un énième livre d’ethnologie qui répond à ces questions. Mieux que cela : « Rois et Royaumes Bamiléké ». Un beau livre qui, à lui tout seul, fait le pari de l’exhaustivité, de la précision et bien sûr de l’esthétique. Paru aux Editions du Schabel, nouveau venu dans l’édition au Cameroun, « Rois et Royaumes Bamiléké » promène son lecteur à travers les grassfields, riches de plus 150 chefferies, les royaumes donc. A chaque halte, en chaque palais, la destinée de chaque royaume est contée, recueillie à la bonne source, auprès de ceux qui, de bouche à oreille et de génération en génération, la conservent et la transmettent. Chaque royaume a sa petite histoire fondatrice et souvent anecdotique. Rien à voir avec les poncifs empreints d’humour du chanteur Saint Bruno. A Bamesingue, c’est « une affaire de jumeaux ». A Bamendjida, tout est arrivé « grâce à un buffle ». A Bapi, les hommes sont venus du ciel. Les Batoufam ont eu leur royaume « pour l’amour d’une princesse »…

Décorum et faste
« Rois et Royaumes Bamiléké », c’est une impressionnante galerie de portraits royaux qui n’a pourtant rien à voir avec un ennuyeux trombinoscope. Les rois, tels de vrais personnages de théâtre, se sont prêtés au jeu. Pour faire de cet ouvrage une fresque vivante et chamarrée. Les « Fo » ont le plus souvent posé seuls, des fois avec leurs « Nkamvu », les grands notables, des fois avec leurs épouses ou leurs « Ntchinda », leurs serviteurs. Toujours avec le décorum, le faste et les atours de ces monarchies qui n’en manquent pas. Loin de là. Même si la tradition n’a pas d’autre choix que celui de cohabiter avec la modernité. Il est en effet assez inattendu de voir Fo Tankoua Thomas, roi de Bamaha depuis 1940, doyen des rois Bamiléké du haut de ses 105 ans, aujourd’hui non voyant, arborer une tenue traditionnelle agrémentée par des baskets. Comme Usain Bolt.
« Rois et Royaumes Bamiléké » se met à la hauteur des standards internationaux et ne pâlirait pas devant les ouvrages du même genre, apanage, jusqu’ici, d’auteurs et d’éditeurs d’ailleurs. Le créneau d’une exigence pointue. Papier glacé, gros travail sur l’illustration et la photo, impression soignée notamment. Hugo Bebe, photographe bien connu, a parcouru tout le pays Bamiléké, traquant çà et là les chefs, et se soumettant à leurs désirs et caprices. Plaît-il ? L’objectif dont Haman Mana et Mireille Bisseck avaient besoin pour poser leurs jolis et justes mots de journalistes impénitents, d’esthètes entêtés de cette écriture qui aime tant à raconter. Le premier, directeur de publication du quotidien Le Jour, vient en effet de s’ouvrir à une autre aventure, celle de l’édition. Un éclectisme qu’il a en partage avec la deuxième. L’instructive introduction du professeur Emmanuel Ghomsi, avec force détails historiques, géographiques et sociologiques, plante brièvement et fort à propos le décor.
Eminent et idoine, l’objectif de l’éditeur est clairement identifié qui reconnaît que « la méconnaissance des Bamiléké, dont la singularité des mœurs et des traditions transparaît, ne contribue pas au Cameroun, qui est un véritable peuple de peuples, à la promotion et au renforcement du sentiment national. Il en est certainement ainsi de bien d’autres communautés au Cameroun. Aussi, est-il nécessaire et utile, à travers des ouvrages exigeants dans la qualité des contenus mais faciles d’accès en terme de lecture, de rendre compte de façon synthétique, et autant que faire se peut, des mœurs, des traditions et de l’histoire des populations de notre pays ». D’autres bienfaits se cachent dans cette merveille de 236 pages qui se contemple d’abord et beaucoup pour se lire ensuite et aisément. Une idée cadeau pour toutes les occasions.
Stéphane Tchakam, in Le Jour
Haman Mana et Mireille Bisseck Eyouck, Rois et Royaumes Bamiléké
, Les éditions du Schabel
, Yaoundé, 2010, 
236 pages 
*Disponible dans toutes les librairies du réseau Messapresse

Des chefs tout en glace


«Rois et royaumes bamilékés» propose une ballade dans l’univers des monarques de l’Ouest.

Les «bangang Fondji» ont les pieds là, mais le cœur ailleurs. C’est du moins ce que raconte la légende qui veut que les populations de ce village, réputées pour leur «propension à régler le moindre problème en sortant leur couteau de son fourreau», ont fait preuve d’intelligence et de technique dès le XVIIè siècle. A cette époque en fait, ils ont construit un « pont des singes » qui reliait les pays bamoun et bamiléké. Ils n’avaient en effet pas oublié leurs origines : le pays bamoun. Le village a été crée par Djomeni, un jumeau, prince de la cour de Foumban qui, «sans doute par désir de voir ailleurs traversa le fleuve et s’installa à l’emplacement actuel avec quelques fidèles. Ils furent désignés bangang, ceux qui ont dit non. […] les troubles liés à la marche vers l’indépendance du Cameroun videront Bangang-Fondji de ses populations. Une bonne partie des hommes et femmes repartiront s’installer dans leur «mère-patrie, le pays bamoun»…

Ce sont des histoires comme celle-là que Haman Mana et Mireille Bisseck proposent aux lecteurs de leur première œuvre collective : «Rois et royaumes bamilékés» paru en début de cette semaine aux éditions du Schabel. Un livre, beau dans la forme et dans le fond qui s’étale tout en glace et laisse découvrir les monarques (Fo, feu, … dans l’ouvrage et selon les localités où les auteurs nous transportent) bamiléké dans leur quotidien. Ceci à travers des textes qui font appel à cette fantaisie que les auteurs, tous deux journalistes, se sont appropriés au fil des ans. Un choix d’écriture qui, loin de distraire la lecture, la facilite et transporte le lecteur dans un univers très souvent entouré de mystères. Des mystères que tente d’éclaircir Emmanuel Ghomsi, professeur d’université connu pour ses parutions sur la question, notamment le « Recueil des traditions historiques des chefferies du plateau Bamileke et de la région de Bamenda, ainsi que des populations Bamoun, Tikar et Mboum, a qui est revenu le devoir d’introduire l’ouvrage.

Comme pour donner de la crédibilité à ces textes qui se lisent et se relisent avec le même intérêt, des photos, toutes en couleur, permettent de faire la connaissance de ces monarques qui ne se rencontrent pas toujours dans la rue. Des rencontres qui permettent au lecteur de (re)découvrir les mœurs et traditions de ce peuple encore «méconnu» du grand public. «Nous avons voulu raconter l’histoire de ce peuple de la manière la plus efficace. Ce livre peut également être utilisé comme un livres d’histoires à raconter le soir, au coucher, aux enfants», lance Haman Mana.
Placé dans la catégorie des «beaux livres», cette parution qui s’étale sur 236 pages a pour objectif de permettre, selon ses auteurs, une meilleure connaissance du peuple. Ne serait-ce pas une littérature de trop sur les «Bamilékés» ? «Non», s’en défend Haman Mana pour qui «notre ouvrage se démarque des parutions précédentes en ceci qu’il n’est pas un ensemble de monographies. Ce sont des histoires que nous avons puisées à bonne source, que nous nous sommes appropriées avec le rendu que nous avons aujourd’hui. Ici, la photo est également très importante. Elle est au cœur du livre».



Dorine Ekwè

Repères
Haman Mana et Mireille Bisseck

Rois et royaumes bamilékés

Editions du Schabel
236 pages
32.000Fcfa




Haman Mana et Mireille Bisseck en territoire Bamiléké



Par Alix Fetué - 02/09/2010





Les bamiléké ont fait ceci, les Bamiléké se comportent comme cela, etc. On y va de toutes sortes de préjugés pour qualifier, à tort ou à raison ce peuple. Peuple des Grass Field de la région de l’ouest Cameroun dont seule l’histoire en appelle pourtant au respect et à l’admiration. Un peuple chargé d’histoire et surtout de traditions, lesquelles sont transmises comme de fil à aiguille, de génération en génération. Ceci par des Fo, les chefs, à la tête des royaumes et gardiens de ces traditions.

Haman Mana et Mireille Bisseck, brillantes plumes de la presse camerounaise, ont fait plus que cela. Ils sont allés aux sources, à la rencontre des Fo eux mêmes. A peu près 150 royaumes et autant de rois, présentés en 236 pages, sur papier glacé. Le livre dévoile, département après département, la petite histoire fondatrice de chaque chefferie. L’on peut ainsi apprendre qu’à Fotouni il aura fallu La tête d’un homme, à Bandjoun c’était Le pouvoir en cadeau de noces, à Batoufam la chefferie est née pour l’amour d’une princesse, à Bapi les hommes sont venus du ciel, à Babone c’était Le petit caillou, à Bafoussam ce fût tant de richesses. Autant d’histoires, anecdotiques pour la plupart, qui initient le lecteur aux mythiques traditions ancestrales et identitaires des royaumes et peuples Bamiléké.

 Une bibliothèque traditionnelleLe beau livre, comme l’exige le genre, fait la part belle aux images. Dans leurs chefferies, ou en pleine cérémonie, les rois ont posé. Ici en compagnie de leurs épouses, là avec leurs Ntchinda, les serviteurs, et ailleurs avec leurs Nkamvu, les grands notables. Plus impressionnants encore, tous ces symboles de culte et de prestige qui entourent les Fo, allant du Ndop, étoffe de rassemblement aux peaux de panthères en passant par la queue de cheval, signe de bravoure. Toute la magie des chefferies de l’ouest transparait dans cette désormais bibliothèque culturelle et traditionnelle des peuples Bamiléké. Des visages naïfs comme celui du rois des Fondonera dans le département de la Menoua, "arrêté" en 2009 alors qu’il n’a que 14 ans, l’on en arrive aux plus avertis, le cas du Fo Tankoua Thomas, doyen des rois Bamiléké du haut de ses 105 ans, roi de Bamaha depuis 1940.

Il était temps que le pari soit tenu, ou mieux, que le défi soit relevé. « Rois et Royaumes Bamiléké » répond de fort belle manière à toutes les exigences des ouvrages du même genre, le fait, jusqu’ici d’auteurs d’ailleurs. Les photos portent les marques du bien connu Hugo Bebe et les plumes qui vont avec sont celles notamment de Mireille Bisseck, journaliste à la Cameroon Radio and Television (CRTV) et Haman Mana directeur de publication du quotidien "Le jour". A sa casquette de journaliste, ce dernier joint désormais celle d’éditeur, à travers les Editions du Schabel, éditrice de « Rois et Royaumes Bamiléké ». L’ouvrage bénéficie en guise d’introduction, d’une profonde étude du Professeur Emmanuel Ghomsi, lequel plante un décor avec pour point de départ la déterminante époque coloniale. Dire que les Bamiléké et leurs rois y ont fortement participé !

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